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Arnaud Benedetti: «La marque d’ Édouard Philippe se développe comme le double inversé d’Emmanuel Macron» - Le Figaro

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Arnaud Benedetti est professeur associé à l’Université Paris-Sorbonne et rédacteur en chef de la revue politique et parlementaire. Il a publié Le coup de com’ permanent (éd. du Cerf, 2017) dans lequel il détaille les stratégies de communication d’Emmanuel Macron.

La victoire d’Édouard Philippe au Havre est celle de tous les paradoxes de la macronie: c’est l’élu local qui l’emporte dans une majorité qui n’est pas parvenue à s’acculturer aux territoires, c’est le centre de gravité à droite d’une aventure qui a commencé à gauche, c’est la ligne claire d’un Premier ministre conservateur contre la ligne flottante d’un président de la République, c’est la sobriété de Matignon en contraste de l’emphase présidentielle.

Tout se passe comme si la marque d’Édouard Philippe se développait comme le double inversé d’Emmanuel Macron, renvoyant ce dernier et son parti dont le locataire de Matignon n’est pas membre à une forme virtuelle, «sans attaches, ni racines» comme l’eut dit le sociologue Karl Mannheim. Philippe opère comme une conscience dans la macronie: il rappelle d’abord que la politique est une affaire de professionnels, de style aussi, n’en faisant jamais trop, conservant en toute circonstance une mesure comportementale qui donne aucune prise à ce soupçon de jouissance du pouvoir d’une part, d’immaturité d’autre part dont nombre de cadres du macronisme ne parviennent pas à se défaire.

Là où Emmanuel Macron est une force qui va, Édouard Philippe est une force qui tient.

Il dit surtout que le barycentre de la majorité ne relève plus du marketing fugace, ce «en même temps» inventé le temps d’une conquête élyséenne par Emmanuel Macron. Pour se survivre politiquement, le chef de l’État n’a d’autre choix que d’assumer son «outing» conservateur, faute de quoi il prend le risque de perdre ce qu’il lui reste de confiance dans un électorat modéré de centre-droit. Les résultats municipaux confortent cette thèse. Le retour, sur fond d’abstention abyssale, d’une gauche sociétale, repeinte en vert, ravive le vent des batailles idéologiques. Il y a désormais trois pôles structurants dans le champ de force des idéologies françaises: le néo-souverainisme incarné majoritairement par le RN, le sociétal, non dépourvu de contradictions à venir, socio-vert, et le conservatisme dont l’incarnation reste à définir. C’est vers cet espace que tend naturellement le chef du gouvernement ; c’est aussi le seul horizon vers lequel peut encore tendre le président de la République, s’il entend concourir à sa réélection. Les grandes métropoles, lesquelles furent le réacteur électoral de la victoire du macronisme, ont basculé là où leur sociologie la plus mobilisée politiquement les portait: la gauche «terra-noviste», vidant de son énergie électorale le parti du Président et soulignant, mutadis mutandis, les ambivalences de ce dernier: le «en même temps» n’est plus un principe actif de gouvernement mais l’expression d’une dissociation entre l’illusion communicante et la réalité politique. C’est cette schizophrénie que la popularité du Premier ministre met aussi en relief. Là où Emmanuel Macron est une force qui va, Édouard Philippe est une force qui tient. Le défi de la poussée verte, effet d’optique surdopé par l’inquiétant et impressionnant retrait civique, contraint le Président à la clarification. Le maintien ou non du Premier ministre à son poste, lequel par contraste sur-souligne tous les manques du macronisme présidentiel, permettra de jauger la stratégie à venir du chef de l’État.

Entre l’alchimie communicante, pari risqué d’une certaine conception de la politique et la physique des solides, autre vision de la politique et dont le Premier ministre est le produit, il faudra choisir ... mais c’est bien la seconde qui est la seule chance de survie d’Emmanuel Macron!




June 29, 2020 at 10:26PM
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